Pour une morsure de chien

EXTRAITS KAST

Des semelles de bois claquant sur le dallage,

me sortent de ma léthargie. La surveillante vient vers

moi.

— Que vous arrive-t-il Monsieur ?

Au lieu de lui répondre, je tends mon bras blessé. Elle

examine ma blessure.

— Votre poignet n’est pas joli ! Un chien ?

J’acquiesce.

Elle a des yeux verts, et me sourit pour me rassurer.

— J’appelle le médecin de garde.

Je n’ai pas prêté d’importance à plusieurs

regards jetés furtivement au dehors.

Elle regagne sa cage en verre, appelle

quelqu’un.

Le temps s’écoule doucement, moi, bizarrement serein,

Échoué au bout du hasard dans une clinique inconnue ;

l’infirmière me jette de temps en temps un coup d’oeil.

Je me perds à nouveau dans la contemplation de l’énigmatique

tableau ; je n’ai pas sommeil, il me faut attendre

des soins qui tardent.

Brusquement, mon regard est attiré vers

l’extérieur par un mouvement insolite dans le camaïeu

d’ombres qui composent le jardin. Ais-je vraiment

aperçu une silhouette courbée en deux et glissant d’un

bosquet à l’autre ? Je regarde attentivement, et aperçois

dans la glace, l’attitude inquiète de la surveillante dont

le regard oscille du jardin à moi. Elle est nerveuse, les

ascenseurs glissent d’un étage à l’autre sans jamais

s’arrêter dans le hall. Je me sens mal à l’aise.

…..

 

Le médecin de garde fait irruption sans le hall ; en

m’apercevant il s’arrête un instant puis s’approche alors

de moi avec un grand sourire.

— Salut Franck ! Tu as des ennuis ? Fais-voir ça.

Il parle d’une voix forte, parfaitement à l’aise en examinant

mon poignet.

Je ne m’appelle pas Franck et il m’est inconnu !

Abasourdi je reste sans voix.

— Attends moi dans mon bureau, c’est le 21 dans ce

couloir ; nous avons une urgence excuse moi, je reviens

de suite.

Comme un automate, je me dirige vers le couloir. Jamais

je n’ai vu cet homme ; je me sens soudain prisonnier d’un

invisible filet. Ne pas perdre pied ! Il flotte dans cette

clinique une étrange atmosphère.

On sort de l’ambulance, quelqu’un de visiblement mal

en point, ficelé dans un brancard ; cinq personnes

sortent des deux voitures, trois d’entre elles ont l’air de

gardes du corps, après un coup d’oeil sur les alentours,

ils entourent le chariot sur lequel on transfère le patient.

Tout le monde s’engouffre dans le hall derrière le chariot

et prend l’ascenseur.

 

…..

— La police ! Ici il n’y a rien de suspect sauf dans votre

imagination. Cependant si vous venez me voir, présentez-

vous comme Franck Varin : c’est le prénom que je

vous ai donné cette nuit. Nous devions nous connaître ;

ce prénom m’est venu tout de suite, c’est le mien.

J’approuve à contre coeur.

— Va pour Franck Varin. Vous m’expliquerez !

J’ai quitté la clinique. Le jour s’est levé. Il fait

un temps splendide, une lumière presque liquide, colle

à la terre, avec de grandes ombres obliques sous un ciel

tout bleu qui donne envie de s’envoler à l’autre bout

du monde. Partir très loin…. Mais avec cette énigme

dans la tête ? La ville est belle, lavée par le froid et la

lumière, avec ses perspectives harmonieuses. Je marche

longuement sur les berges du fleuve rêvant d’une évasion

qui me semble à présent interdite.

…..

 

Le lendemain, je fais pour la première fois de

jour, le trajet jusqu’à la clinique : avec la lumière tout

a changé, les fantômes se sont enfuis. La colline des

Remparts domine la ville, les rues grimpent en lacets,

bordées de pavillons et de jardins.

La clinique est en effervescence : gendarmes, pompiers,

26

employés de voierie s’activent autour du bâtiment.

Il me faut décliner à plusieurs reprises mon identité et

expliquer que je suis un “patient” du docteur Richard ce

qui fait naître chez certains policiers, une expression de

méfiance

 

…..

 

— Je vous écoute monsieur Varin. Parlez-moi de ces

séquelles.

— Je suis filé ; pourriez-vous m’expliquer pourquoi ?

Il hausse les épaules :

— Je n’en sais rien ! Mais vous l’êtes probablement. Vous

avez ouvert une porte qu’il valait mieux ne pas pousser.

— Qui donc me file ?

— Aucune idée.

Bien sûr qu’il en a, une idée !

— Cet incendie…

— Il pourrait être criminel… Des gens contestent nos

protocoles thérapeutiques.

— Vous utilisez ici des traitements que ne pratiquent pas

d’autres établissements ?

— C’est ce qu’ils prétendent !

Un silence bizarre s’installe. Les murs de cette clinique

ne m’inspirent pas confiance.

— Pourrions-nous continuer cet entretien ailleurs ?

…..

— Ca y est !

— Vous en êtes sûre ?

— Venez voir par vous-même.

— Non. Je vous crois …. Il n’y a pas encore de retour ?

— Pas encore.

L’homme chuchote.

— Vous avez vérifié la …… asion ?

Il a parlé si bas que le mot m’échappe.

— Oui, rien pour l’instant. Mais il y a des gens qui

rôdent.

Un court silence, puis la femme ajoute :

— J’ai peur, monsieur. On me suit, on me guette nuit

et jour, depuis tellement longtemps, je n’en peux plus.

— Vous êtes victime de votre imagination. Rien n’arrivera

tant que nous n’avons pas de preuves formelles.

La femme sort, l’homme reprend son va et vient.

Le téléphone sonne, je sursaute, l’homme décroche

aussitôt.

— Allô Franck ? Je vous laisse faire.

Un long silence.

— Le dernier compte-rendu est à l’abri dans un coffre ;

s’il arrive la moindre chose à l’un d’entre nous, quelqu’un

à l’ordre d’en faire ce que vous savez.

…..

« Il ne va pas tarder à se réveiller.. ! »

La voix me parvient comme venue du fond d’une tuyauterie

: je perçois des ombres, une lumière indécise et une

forte odeur de renfermé ; des taches de rouille constellent

le plafond, une lumière glaciale règne dans cette chambre

désolée. La voix vient d’une zone d’ombre près du lit. Je

me redresse, tente de m’asseoir et m’apprête à descendre

quand une main gantée s’interpose, autoritaire.

— Restez sur le lit !

— Qui êtes-vous ? Que me voulez-vous ?

— C’est moi qui pose les questions ! Me réplique l’inconnu.

— Avez-vous une idée du cirque où vous avez mis les

pieds, Laurent Varin ? Savez-vous ce qui arrive à ceux

qui échafaudent des suppositions sans pouvoir les

vérifier ?

Je hausse les épaules, attentif à saisir la moindre lueur

dans ses propos.

— Ceux qui font des suppositions sans les vérifier se

retrouvent au cimetière.

— Ah ! Et s’ils vérifient ?

Les fleurs du mur prennent des allures de couronnes

avec « Regrets Eternels »

— Vous n’en êtes pas là ! La dernière victime, un journaliste

inconnu qui n’avait pas vérifié ses sources, flottait

sur le fleuve ; on a parlé d’un suicide.

Il rit du bout des lèvres.

…..

Une porte s’ouvre sur un atelier de mécanique, une autre

marquée « Magasin » est fermée à clef, une imposte

perce le mur au dessus de la porte. Je prends un escabeau

dans l’atelier, l’ayant escaladé j’examine la salle plongée

dans une pénombre phosphorescente.

« Ce magasin n’en est pas un ; les murs sont tapissés

d’appareils éteints, de consoles reliées entre elles par un

inextricable réseau de connexions. Une bibliothèque,

un planning, un tableau noir couvert de signes, avec un

immense point d’interrogation. Sans doute un laboratoire

de recherche. Les formules du tableau sont incompréhensibles,

deux zones le partagent, baptisées D et A entre

lesquelles s’entrecroisent de multiples flèches.

 

…..

— Il paraît que tu ne fais pas partie de la horde des

furieux ; alors que viens-tu chercher ici ? Tes rêves ? Tu

es candide. Ici il n’y a que de la peur !

Il éclate d’un rire sardonique, tend le bras dans un geste

circulaire, comme un prédicateur annonçant la fin du

monde.

« Je me sens saisi de terreur sans raison précise… »

Alexis est nébuleux, comme Richard, comme

ces inconnus qui m’ont séquestré. Quel jeu un médecin,

des barbouzes et un chauffeur à moitié fou pratiquent-ils

?

— En cet instant, mon fils…

Je lui lance que je ne suis pas son fils. Peine perdue, il

ne m’écoute pas.

–….en cet instant, une poignée d’hommes cramponnés

à leurs instruments tentent de comprendre une drôle de

musique, et les espions tapis dans l’ombre ont la frousse,

comme si une bombe nucléaire allait leur péter dans

les pattes.

…..

— Ecoute camarade, fiche le camp de cette ville de

merde, va voir les déserts qui te collent la langue au

palais, les forêts d’enfer, les rivages qui mugissent

sous le vent ! MAIS NE COMMENCE PAS TON

EXPLORATION ICI ! Loin, très loin il y a… Ah ha, ha !

N’oublie pas ! A A A ? Rit-il ? Toujours cette reproduction

énigmatique qui a disparu du bureau de Richard.

…..

À présent on dit que

je suis folle, on me surveille. Etes-vous vraiment des

collègues de mon mari ? Je ne sais pas, et je m’en moque,

mais à force de parler peut-être apprendra-t-on un jour

ce que Jean Marie avait découvert.

— Il vous l’avait confié ?

— Non. On n’a jamais retrouvé son corps. Il doit se

trouver dans un institut médico-légal ; ou très loin

d’ici. On me le cache ! Disparu depuis des mois et

identifié récemment, noyé ! On a inventé sa mort. Il ne

m’a jamais rien dit, mais je sais qu’il n’était pas devenu

fou. C’était un homme calme, équilibré, passionné

par son métier si mal servi par les journaleux sans

scrupules. Il tenait à la vérité, sinon, il se taisait. On

ne devient pas subitement exalté, comme il le devint

sans raison apparente. Il semblait effrayé à l’idée de

me révéler ce qu’il avait découvert par hasard. Une…

chose capable de semer la folie absolue… murmurait-il.

…..

Agnès repart dans son ailleurs :

— Kast a découvert une chose exceptionnelle. Mais il a du

détraquer le phénomène en l’observant… comme l’analyse

d’un phénomène quantique fait basculer un équilibre

d’états invisibles en ne dévoilant qu’un seul plateau de la

balance ! Kast ne sait plus comment s’en sortir.

Je suis éberlué ! Agnès s’intéresse au domaine mystérieux

de la mécanique quantique !

…..

L’hôtel qui nous accueille porte les traces de

récents combats, la plupart des vitres gisent en tas scintillants

sur les dalles. Les occupants sont des journalistes,

des ressortissants étrangers coincés là par le conflit.

Quelle nuit ! Dans l’odeur âcre des fumées,

de la poudre, des rafales sporadiques, Agnès dort d’un

sommeil de plomb. Assis sur le lit, je passe en revue, les

raisons qui ont pu pousser Karl Riben dans ce chaos.

Au matin le calme est revenu.

Plusieurs jours se passent à errer dans la ville blessée, à

la recherche d’un indice.

Entre les façades criblées d’impacts, aux magasins rafistolés,

une foule agitée poursuit son activité : les bus et les

tramways sont bondés, des grappes de gens débordent

des marchepieds. La vie continue. Les tirs anarchiques

ne troublent personne.

Qu’est venu chercher dans ce désordre fatal l’Ingénieur

de Kast ? Que pourrait percevoir une fourmi courant sur

la plaque d’un microscope, de l’homme qui l’examine à

travers l’oculaire ? Rien. Elle ne peut savoir qu’il existe :

il est dans un autre système qui lui est étranger. Nous

sommes les fourmis de Karl Riben.

Nous errons parmi les ruines.

…..

Des chariots rouillés ramènent

des momies blêmes du bloc opératoire. Tout est sueur,

peur, sang. Une stupéfaction moite règne sous la tente.

On rafistole ici la folie des hommes.

Quel lien avec la clinique des Sauges ?

 

Nous nous sommes posés dans un pays de

nulle part, blanc et or, La porte du Yuhl est une ville

étrange, Samarna aux ruelles chaudes peuplées d’une

foule bigarrée dont je ne parviens pas à découvrir les

racines. Maures, Andalous, Nordiques échoués là. Mille

visages nous frôlent dans la pénombre des ruelles, se

jouant de notre perplexité

 

Quelle a été la raison de l’égarement de Riben

dans les sables ? Une réaction contre les désordres du

Ragstan ?

Agnès et moi sommes perdus dans les mondes chaotiques

du docteur fou.

 

Malano! Deux jours d’escale dans une cité

moite cernée d’eau et de lourdes frondaisons. Toutes

sortes d’individus forment ici une communauté de

fuyards. Des résistants, des évadés, des fous rôdent le soir

le long des comptoirs enfumés, dans la chaleur épaisse

brassée par des pankas inefficaces. Nous interrogeons

des tas de gens au sujet de Pulsar, ce point cardinal que

nous chargeons de toutes nos espérances de fuite. Un

homme a fini par déployer une carte crasseuse, en nous

indiquant l’endroit évoqué par Alexis dans son antre de

la clinique. Pulsar !

 

Une piste taillée dans la forêt apparaît enfin au bout du

dernier cap griffonné sur la carte.

Nous amorçons notre descente. Les monolithes dressés

un peu partout montent vers le ciel, la terre glisse plus

vite. L’avion prend contact avec une terre rouge grossièrement

aplanie ; l’hélice s’immobilise, j’ouvre la verrière

sur une atmosphère brûlante, pleine des jacassements

d’oiseaux invisibles. Une hutte de palme, un réservoir de

carburant, deux avions poussiéreux, une jeep.

Une langue étrange règne ici. Les mots

sont mélodieux chargés de sonorités musicales sans composer

un chant. L’origine de ce phénomène nous échappe,

mais nous comprenons parfaitement leurs propos.. D’où

vient cette singularité ? Ils ont synthétisé un nouveau

langage de mots et de notes. La musique, voix universelle

coule dans leurs paroles avec toutes ses nuances exprimant

les subtilités de leurs sentiments : modes mineur, majeur,

gammes, tonalités, retransposés forment un alliage subtil

de phrases expressives. D’où leur vient ce pouvoir ? Nous

comprenons sans difficulté ce langage bizarre.

Sommes-nous encore vivants ?

un phénomène qu’un savant fou aurait libéré.

Et ils prétendent ne pas avoir entendu parler des gens de

la clinique des Sauges !

 

Un matin nous avons survolé un tepuy. De

mystérieuses ouvertures s’enfoncent verticalement dans le

plateau qui forme le sommet. De monstrueuses fougères

accrochées aux parois nous dérobent le fond de ces

gouffres. Souvent je me remémore l’énigmatique peinture,

et ce tableau dans lebureau de Richard qu’il s’est empressé

de faire disparaître.Ces tepuys l’auraient-ils inspiré.

Il faudrait pouvoir les observer depuis le sol, chercher une ressemblance.

 

Nous tournons autour de l’énigme sans qu’elle se révèle :

pour comprendre, il faudrait s’y perdre comme la

lumière s’éteint dans un trou noir. Pour atteindre le

néant ? La découverte de Kast est issue d’une autre

vérité ;

 

J’embarque dans le long courrier. La porte de

l’appareil s’est refermée sur le souffle tiède des alizés.

Onze mois se sont écoulés depuis l’instant où le chien

m’a mordu.

Nous atterrissons dans le paysage gris d’un

printemps pourri. Qui pourrait me guetter parmi ces

passagers qu’une mauvaise nuit et le froid ont rendus

moroses ? Je suis retombé dans la nasse comme un idiot,

victime d’une intuition invérifiable d’Agnès. Ils doivent

être autour de moi, les barbouzes immuables des folies

de Kast, mais je ne parviens pas à les détecter.

Loin du gris, là où j’ai hâte de retourner

vivre près d’elle, pour nous faire oublier.

Mais auparavant, il me faut obtenir une réponse à

l’intuition d’Agnès : « Il s’est passé quelque chose. »

— Je suis revenu pour SAVOIR.

 

 

Alexis sort de sa poche son morceau de tuyau et le

brandit à mon intention.

— Voilà par où la gueuse passe du nord au sud, de nulle

part à autre part, d’hier à avant hier ou demain… le

nord, c’est le froid, la nuit, le sud la lumière, la chaleur.

— Ta gueule Alexis ! Lance Richard.

 

Une idée fulgurante me saisit : L’imagination débridée de

Kast a perverti Richard, Riben, Alexis, Zoltan, Morse… Tous

à présent victimes d’une hallucination qu’ils ont matérialisée

à force d’y croire, libérant un phénomène inconnu porteur

de tous leurs fantasmes. Un phénomène devenu

incontrôlable. Réel ou fictif ? Utopie ? Illusion ?

Simulacre de réalité.

 

Personne apparemment n’a été au delà de Pulsar.

La clé de cette folie qui se déroule devant moi se trouverait

à l’autre bout du monde ?

 

— Dans quelle circonstance cette « étrangeté » s’est

révélée à vous.

–C’est arrivé par hasard, une nuit à la clinique.

 

Je sais avant qu’elle poursuive ce qu’elle va me demander.

— Il faut aller plus loin que Pulsar. Finir le trajet qu’a suivi

Karl Riben. Aller jusqu’au bout, trouver ce que signifie ce

A..A.A. C’est près d’ici, je le sens. Pendant ton absence j’ai

interrogé les gens de Pulsar, récolté des bribes d’indices.

Il existe un lieu qu’il est soi-disant interdit d’approcher.

Personne ne veut prononcer son nom. Un lieu sacré que

vénèrent les indiens de génération en génération. Ce doit

être ce A..A.A. Il faut remplacer les points par des lettres,

compléter son nom le repérer, aller voir.

 

Agnès m’a entrainé dans sa hantise : ce triple A sans

lequel nous ne pouvons mettre un terme à notre quête.

À présent, comment vais-je m’y prendre ? Il

me faut survoler cet océan de verdure à la recherche

d’une similitude.

Je n’ai que ma mémoire pour reconstituer ces images énigmatiques

que je regrette de n’avoir pas examiné avec plus

d’attention. Le tableau et la gravure du bureau de Richard

représentent certainement le même lieu.

 

Son doigt s’est posé sur une des marques, libérant une

cascade de mots gutturaux dont je ne comprends goutte.

Cliff semble satisfait.

— Il veut bien nous y conduire, mais ce tepuy est sacré.

Personne n’a le droit d’y aller. Il nous le montrera de

loin, c’est tout.

Les mots s’échappent de mes lèvres. Je suis dans un état

second. Je trace à nouveau sur le sol avec mon doigt les

A..A.A.

 

On nous attend au bord de la piste. Quand je

coupe le moteur ils s’approchent avec précaution comme

si nous étions devenus contagieux, mettant en danger la

sécurité de Pulsar.

Tacalparu un instant entouré de regards interrogatifs,

est resté de marbre, puis avec un port hautain a pris le

sentier vers son village.

 

Demain à l’aube, nous attaquerons le colosse pour

trouver une réponse ou rien de concret, m’abandonnant

alors dans le Doute absolu.

 

À la place de la pelouse s’étend un jardin de rocaille. Des

traces de tranchées récemment comblées, sont encore

visibles.

J’entre dans le hall : l’énigmatique tableau n’est

plus là, des peintures naïves le remplacent. Le mobilier

n’est plus le même. À la réception, une femme dans un

fauteuil roulant trie des papiers. Elle lève vers moi un

regard distrait.

— Monsieur ?

— Bonjour, je cherche le docteur Kast.

Elle a l’air surprise.

— Le docteur Kast ? Il doit y avoir une erreur…

 

Après m’avoir observé sans rien dire Alexis va vers une

armoire, fouille dans un tiroir, et revient vers moi une

enveloppe à la main. Mon nom y est inscrit.

 

— C’est ça. Vous êtes bien né dans cette commune ?

Il faut que je me reprenne. Gagner du temps ! Je ne réponds

pas tout de suite ; je veux absolument consulter les registres.

— Monsieur ? Etes-vous bien né dans cette commune ? Il

peut y avoir une erreur de date.

— Puis-je voir le registre ?

On finit par me le montrer. Je n’y figure pas. Aucune

rature. Le papier, l’écriture, les cachets de cette page

semblent avoir mon âge. Je regarde l’employé, ses

collègues qui m’observent du coin de l’oeil. Sont-ils complices

? Ou bien tout a-t-il été occulté en leur absence ?

Je referme le registre.

— Excusez-moi, j’ai du me tromper ; ça arrive quelque fois.

 

 

 

 

 

Elle était là, ma réponse. Ce besoin qu’on a

l’un de l’autre peut faire changer le monde, et transgresser

les conventions.

 

Kast, Franck, Alexis et tous les autres touchés

par cette aventure sont-ils encore vivants ? Les hommes

du Pouvoir n’ont certainement pas relâché leur surveillance.

Ils guettent l’apparition intempestive des documents

de Kast. Et peut-être les révélations posthumes de

Morse. Pourront-ils empêcher leur publication ?

 

J’éprouve l’impérieux besoin de revoir une

ultime fois ce square où tout à commencé. Pour couper

une amarre qui traîne dans ma tête. Rompre le passé,

avancer ensuite. Avancer. J’irai, donc me remémorer

cette aventure là où un chien errant m’a, d’un coup de

mâchoire ouvert la voie.

 

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